» Mon Histoire:


Nous venons tous au monde dans un lieu spécial, un endroit que nos parents ont choisi pour nous donner la vie. Du moins, si ce n’est le lieu en lui-même, le décors, une ville, un pays. Moi ? Je suis née aux Etats Unis, à Chicago, pour être un peu plus précise dans l’ouest de la ville, un hôpital universitaire, treize heures de souffrance pour ma mère et l’équivalent de trois paquets de cigarettes pour mon père. Ma naissance ne fut pas un grand événement. Je ne peux pas vous dire « il y avait ce jour là une bonne vingtaine de personnes, leurs visages souriants, attendant l’annonce de ma venue au monde, ma taille, mon poids, mon petit prénom » ce serait un peu trop faux à mon goût. Pour vous dire la vérité et pouvoir passer à autre chose, voilà comment c’est réellement passé ma naissance. Il était vingt et une quarante trois un quatorze mai il y a dix huit ans maintenant. Ma mère, une femme courageuse qui s’est enfermé quelques années plus tôt dans un mariage par dépit. Comme quoi la vie peut vraiment mener à des extrêmes. Mon père lui, un employé de banque, promu le jour même, qui se serait sans doute passer de son mariage autant que d’avoir un enfant. Ma naissance donc, mes parents avaient passé un petit moment à choisir un prénom, après tout on leur avait annoncé la naissance d’un beau garçon… raté ! Je suis bel et bien une fille, il fallait faire avec… alors plutôt que de m’appeler Samuel ils m’appelèrent Sam tout simplement. C’est un prénom que l’on entend pour les hommes, peu pour les femmes, sauf les Samantha mais mes parents n’ont pas pris la peine de chercher plus loin. Nous vivions dans une banlieue de Chicago. Je n’étais pas malheureuse étant petite, certes mon père, les premiers mois, fut déçu de ne pas avoir de fils, mais cela lui passa, et ma mère mit en moi tout l’amour qu’elle ne pouvait donner à mon père, ni à personne. Quoi qu’il en soit, elle s’occupa assez bien de moi, si on prend en compte le fait que j’ai toujours vu mon père ignorer sa vie de famille en faveur de son travail et je l’apprendrais plus tard de ses maitresses.

Enfin, tout ce qu’il y a retenir de ma venue au monde, c’est bien le fait qu’on ne choisit pas sa famille, mais qu’on fait très bien avec. La preuve, mes américains typiques de parents ont su me donner ce qu’il fallait jusqu’à ce que j’ai un certain âge, du moins suffisamment pour que je puisse manger à ma faim et apprendre ce qui finalement me permettrait de survivre plus tard. Je ne dis pas qu’ils sont de mauvais parents, ils n’ont simplement pas eu de chance, ils n’auraient jamais du être parents ensemble, tous les deux, ce n’était pas une bonne affaire malheureusement pour moi ils s’en sont rendu compte un peu trop tôt et surtout ils n’ont pas été capable de prendre les bonnes décisions. Dommage comme on dit.


La vérité ? Je suis née sous le nom de Sam Brentson. Un nom que je n’affectionne pas du tout, je préfère celui que je porte aujourd’hui, mais passons. Je ne me rappelle pas vraiment mes premières années avec mes parents, j’étais trop jeune, et je pense en avoir oublier une partie par envie. Mes parents, ils se sont toujours déchirés, du moins c’est l’impression que j’ai lorsque je repense au passé. Lorsque j’avais huit ans tout bascula pour moi, ce que je n’avais jamais pensé possible arriva. Ma mère avait certes des défauts, tout comme mon père, mais je ne les pensais pas capable d’une chose pareille. Eux ont donné dix ans de leur vie à ce mariage, huit ans à ma petite personne, et cela a du leur suffire, du moins je le suppose. Je me rappelle très bien ce jour, surement parce qu’il fut le premier du reste de ma vie comme on dit.

« Je te déteste ! Vas t-en ! » Je n’étais qu’une enfant, pourtant cette façon dont ma mère a prononcé ces quelques mots en direction de mon paternel… j’ai su instantanément que cela allait très mal finir. « Tu sais quoi ? Peu importe, je hais cette vie, je te hais et je hais ce que tu m’as imposé ! » Ce qu’elle lui a imposé, moi autrement dit, quoi d’autre ? Une petite vie tranquille ? Peut être bien, mais le dégout dans sa voix, je l’avais lu dans ses yeux depuis longtemps lorsqu’il me regardait, lorsque j’avais le malheur de l’appeler papa. « Vas t-en ! » Je me rappelle avoir sursauté, elle hurlait et lui ne fit qu’une chose, sourire et partir. Comment avait-il pu accepter cela ? Je ne le savais pas mais aujourd’hui je suis convaincu que ce soir là il a trouvé le courage qu’il aurait du avoir dix ans plus tôt. Ma mère elle resta planté là pendant de longues minutes son regard allant de la porte d’entrée jusqu’au plafond, je pense qu’elle croyait ma petite personne endormie depuis longtemps, allez savoir.

Elle claqua la porte elle aussi, deux jours plus tard, me donnant à manger, elle me mit au lit et lorsque je me réveillais le lendemain, j’étais seule. Mon père, je pouvais comprendre, il ne m’avait jamais aimé, mais ma mère… je pensais qu’elle tenait à moi, réellement. Finalement je ne sais pas vraiment comment tout cela c’est passé, notre voisine, la vieille madame Goldman est arrivée quelques minutes après que j’ai fouillé la maison et m’a emmené chez elle. Je ne comprenais pas, et je n’appris que des années plus tard que ma mère, dans un ultime soucis de ma survie, lui avait demandé de s’occuper de moi pendant un temps. Un temps qui parut sans doute trop long à cette vieille dame qui me confia aux services sociaux. Je n’étais pas une enfant très heureuse à l’époque mais j’étais loin d’imaginer la vie qui m’attendait, qui me donnerait encore plus de peine que je n’en connaissais déjà.

« Alors Sam, comment te sens-tu ma chérie ? » Je détestais cela. Bon d’accord elle pensait bien faire, elle avait tord. Cela faisait déjà six ans que j’étais dans cet endroit de fou, allant de chambre en chambre, de famille d’accueil en famille d’accueil. Je les avais toutes détesté, et surtout je m’étais enfuis à chaque fois, tentant d’aller plus loin que la fois précédente, me retrouvant toujours rapatriée dans cet enfer. Je ne comprenais pas ce qu’elle me voulait. On m’avait dis qu’il était temps pour moi de voir quelqu’un. Je n’aimais pas qu’elle m’appelle « chérie » elle devait penser me mettre à l’aise, c’était tout le contraire. « Bien. » Je suis devenue assez taciturne avec le temps, renfermée, je n’ai pas d’amis, cela ne me servirait à rien, pour que eux aussi finissent par partir ? Très peu pour moi. « Je sais que ça n’a pas été facile pour toi depuis six ans, mais j’aimerais que tu me dise ce que tu ressens. » Croyait-elle vraiment que j’allais m’ouvrir tout à coup et lui déballer mes états d’âme ? Apparemment oui. Je ne suis pas quelqu’un de méchant, bien au contraire, mais à quatorze ans, en pleine crise d’adolescence, on est susceptible, indépendant, moi encore plus, après six ans sans parents, sans personne, avec le sentiment d’être seule au monde, on commence à se dire que c’est mieux ainsi. Cela m’a été bénéfique, m’a forgé le caractère comme on dit. « Je peux y aller ? » Je devais rester là une heure, non mais franchement… De toute évidence elle sut qu’elle ne tirait rien de moi, puisqu’elle me laissa partir sur un soupire.

Quoi qu’il en soit, à quatorze ans, rien de ce que l’on peut vous dire ne vous aide. Autant être franche, j’ai entendue pendant des années des « pauvre petite », « comme c’est horrible », etc.. pourtant aucune famille respectable n’a voulu de moi, j’ai été trimbalée, comme bien des gosses de l’orphelinat, de familles d’alcooliques à familles brutales… et le pire dans tout ça c’est qu’avec le temps, je ne m’en rendais plus compte, j’ai préféré m’enfermer dans un autre monde, penser à ce qui me faisait réellement envie, imaginer une famille, une mère un père et des enfants. Quelque chose que je n’aurais jamais, mais après tout c’est à cela que servent les rêves, rattraper la réalité qui est souvent trop sombre, du moins à mon goût. Alors oui on peut dire que je n’ai pas eu de chance mais je dis « c’est comme ça » et voilà tout. La roue tourne après tout.



« Tu fais quoi là ? » Je regardais mon frère comme s’il était complètement idiot. Le pauvre, on peut dire que j’étais parfois un peu vache avec lui, certes c’était toujours ainsi entre frères et sœurs, mais pas lorsqu’on doit tant à son frère. Dean, il n’est pas réellement mon frère, il m’a juste trouvée. Pathétique n’est-ce pas ? Peu importe, je me trouve chanceuse. Dean est celui qui m’a permis d’échapper à ma vie d’enfant abandonnée, d’oublier que je n’étais qu’une gamine dont personne ne voulait. Il a su me prouver qu’on pouvait tenir à quelqu’un l’aimer et le lui prouver. Il l’a fait, il m’a laissé entrevoir des secrets à propos de lui que sa propre famille ne connait pas. Les loups garous, vous y croyez ? Bien sur que non, qui croirait à un truc pareil ? Moi. Enfin, avant non, mais quand j’ai vu mon frère subir sa transformation, j’ai changé d’avis. Il doit se demander pourquoi je ne suis pas partie en courant, c’est vrai, j’aurais pu hurler, m’évanouir, fuir à toutes jambes. Au lieu de ça, je suis restée, j’ai littéralement jubilée. Parce que c’était ce qui le rendait spécial, parce qu’il avait quelque chose qui le destinait à un avenir prometteur, là où je n’étais qu’une adolescente perdue. Mais mon frère a du sentir que j’avais besoin de cela, d’un but dans la vie, de quelque chose qui me fasse me sentir spéciale. Et oui je suis un loup comme on dit. Je ne le suis pas de naissance comme Dean, je le suis devenue, grâce à lui. « Quoi qu’est-ce que je fais ? » Je levais les yeux au ciel, certes je lui devais énormément mais parfois il se comportait beaucoup trop comme un mec ! Aujourd’hui je ne suis plus celle que j’étais pendant toutes ces années. Cette fille, qui fuit le monde, qui ne se lie à personne, qui ne parle pas, ou peu, qui se méfie de ceux ayant le malheur de l’approcher. Aujourd’hui je suis Sam Willson, une femme presque comme les autres. Si on enlève le fait que je sois un loup depuis quelques années, je suis avant tout le sourire sur mon visage, la lueur dans mes yeux, le fait qu’aujourd’hui rien n’est plus important pour moi que ceux qui m’entourent, le fait que j’aille aider les autres, alors qu’avant j’aurais dis « cela ne me concerne pas ». Alors si cela n’est pas un bon exemple que les gens peuvent changer, je ne comprends vraiment rien. « T’as qu’à aller la renifler pendant que tu y es ! Et depuis quand t’aime les blondes ? » Je soupirais, agacée, parce que je n’aimais pas ce genre de choses, le machisme, bien que dans son cas c’était différent et je le savais. Il se mit à rire et m’attrapa par le cou m’entrainant avec lui en direction d’un restaurant. Je suis dure avec lui, un peu susceptible, il me reste des traces je ne le nie pas, si je suis aujourd’hui épanouie et heureuse, je me rappelle l’époque où je n’étais que Sam la gamine des rues, je rêve chaque nuit de mes parents, je rêve de l’orphelinat, de ces familles, parfois je me réveille en sursaut, et je vais voir si Dean est toujours là. Un reflexe, le besoin de me rassurer, de savoir que lui non plus ne partira pas en pleine nuit en me laissant seule…

« T’as une sale tête. » Je levais les yeux au ciel, m’asseyant sans faire attention où je me posais levant les yeux vers mon ami debout face à moi. « C’est sympa merci… » Je n’étais pas du genre à prendre ce genre de réflexion comme blessante, mais bon j'avoue que cela avait tout de même piquer ma fierté. « C’est pas ce que je voulais dire, t’as mal dormi ? » Je soupirais, me contentant de hocher la tête pour signifier que oui j’avais mal dormi. Je ne voulais pas entrer sur ce terrain, il y aurait eu un pourquoi et je n’avais aucune envie de dire que j’avais fait un cauchemar stupide dans lequel j’étais complètement seule dans la forêt et que tous étaient partis sans moi… Pathétique. Bref. Je préférais m’avancer et m’assurer un terrain qui ne serait pas glissant pour moi. « Ou est ton frère ? » Ryan, un très bon ami, son frère James, mon meilleur ami. Oui on peut dire que j’avais évolué avec le temps, j’avais réussi à me trouver une famille, et même des amis qui comptaient plus que tout, j’en avais fait un sacré bout de chemin. « Je sais pas trop… peut être avec Lucky. » Je hochais la tête, ça ne m’étonnait pas, je passais pas mal de temps avec Ryan depuis un moment, non pas que cela me dérange bien au contraire, l’absence de James m’a permis de trouver en Ryan quelqu’un d’adorable, avec qui je peux rire, et passer du temps sans penser à « de quoi demain sera fait ». Quoi qu’il en soit, mon meilleur ami avait trouvé la femme de sa vie, du moins elle était sa petite amie cette Lucky. Je dois avouer qu’au début je ne l’aimais pas du tout, parce qu’elle me volait James tout simplement. J’étais sans doute un peu trop aveuglée par ma possessivité, mais peu importe. Le temps nous ouvre les yeux, cela c’est passé ainsi pour moi. J’ai oublié deux secondes ma petite personne et j’ai pu voir qu’il était heureux. Cela me suffisait amplement. « Alors puisque de toute évidence nous n'avons rien de prévu, je propose qu’on fasse une balade, j’ai besoin d’air frais. » Je me relevais, attrapant Ryan par la manche de son pull je le tirais dans la direction que j’avais choisi, le relâchant rapidement. Oui j’avais de la chance, une nouvelle vie, un nouveau départ, des personnes merveilleuses. Que demander de plus ?


Je ne pourrais pas dire où je serais dans cinq ans, ni dans dix ans, car très franchement je n’en sais rien. Comme tout le monde j’ai des souhaits bien sur, j’ai envie de me dire que dans cinq ans, je serais diplômée, j’aurais une jolie maison avec un beau jardin, une barrière blanche, que mon frère soit heureux... Oui je pourrais souhaiter tout cela, mais ça ne me ressemble pas. J’avoue ne pas vivre en pensant à l’avenir. Mon passé m’a appris que tout peu changer en quelques secondes, alors je n’aime pas spéculer. Mais bon je n’espère qu’une seule chose pour les années à venir, que les loups sauvages ne soient plus qu’un mauvais souvenir, que notre petite ville puisse retrouver sa tranquillité. Oui parce qu’après tout si nous voulons construire quelque chose pour nous même, il faut avant tout que nous puissions le faire sans regarder derrière nous à chaque seconde.

« Tu ne crois pas qu’il serait temps que tu te trouve un mec ? » Je levais les yeux vers mon amie, hésitant entre le fait que je sois choquée par ses mots mais aussi un peu blessée. Elle n’avait pas complètement tord après tout. Mais je n’allais pas le reconnaitre si facilement, ce n’est pas ainsi que je fonctionne. « Pourquoi ? Je suis très heureuse comme ça. » Elle ne sembla pas convaincue, elle ne pouvait pas comprendre. Pendant des années je me suis débrouillée seule et faire confiance aux autres, leur permettre d’entrer dans ma vie, c’était déjà énorme pour moi, alors faire assez confiance à quelqu’un et lui donner la possibilité de me briser le cœur… très peu pour moi. « Tu sais ce que je veux dire Sam, ça te ferait pas de mal, tu sais c’est sympa d’avoir quelqu’un dans sa vie. » Je n’en doutais pas, mais je n’étais pas ce genre de femme, qui a besoin d’un homme près d’elle pour se sentir bien, non je me débrouille bien toute seule, comme depuis toujours. « Si tu le dis. » Je n’avais pas vraiment envie d’aborder ce sujet, le seul mec avait qui je sois sorti était un vrai con, et cela remontait à mes quinze ans. Non décidément ce n’était pas un sujet que je voulais aborder.